L’EST DU VAL-D’OISE EST-IL UN TERRITOIRE PAUVRE ?

En réponse au discours misérabiliste des élus du SIEVO qui proclament la nécessité de grands projets coûteux et d’une gare inutile en plein champ sur le Triangle de Gonesse… au nom de l’emploi seul moyen de réduire la « pauvreté » des populations du territoire, voici une analyse par commune des données fiscales de 2010, qui viennent réactualiser les chiffres présentés sur le site du SIEVO, qui datent de 2000.

Il en ressort ce qu’on savait déjà, c’est-à-dire qu’il s’agit d’un territoire sans unité où les communes riches côtoient les communes pauvres. Et que les élus qui revendiquent des créations d’emplois au nom « des fractures territoriales »… ne sont pas forcément dans les localités les plus à plaindre… Ce qui frappe à la lecture de ces chiffres, c’est l’importance des inégalités territoriales : entre communes voisines, mais aussi à l’intérieur d’une même collectivité. Il y a un contraste saisissant entre les localités fortement soumises aux nuisances des deux aéroports (notamment Garges-lès-Gonesse par le Bourget et Goussainville/Gonesse par Roissy) et des communes résidentielles privilégiées situées au Nord de la plaine de France et faiblement impactées par les infrastructures de transports (aéroportuaires et routières).

Les revenus médians les plus élevés (plus de 2000 euros/mois) sont sans surprise relevés dans la partie Nord de la communauté d’agglomération Roissy-Porte de France à St-Witz (2967 €) largement en tête, puis Villeron (2228 €), Vémars (2057 €), Marly-la-Ville (2046), Fontenay-en-Parisis (2042), Le Mesnil-Aubry (2030). Des communes qui figurent en jaune sur le graphique joint.

A l’inverse, les revenus les plus faibles (en bleu foncé sur le graphique) se constatent sur le territoire de la CA de Val de France, en zone agglomérée dense avec une forte concentration de quartiers d’habitat social : Sarcelles (1016 €), Villiers-le-Bel (990 €) et Garges-lès-Gonesse en queue de peloton (881 €). Des chiffres largement en dessous du niveau vald’oisien (1696 €), lui-même assez proche du score national qui constitue ici notre meilleur élément de comparaison (1602 €). L’Ile-de-France ayant le revenu médian (1816 €) le plus élevé des régions françaises, boosté par les hauts revenus de Paris et des Hauts-de-Seine.

Entre ces deux situations extrêmes, nous avons figuré en vert sur notre graphique les communes nettement au-dessus de la moyenne départementale : Puiseux-en-France (1987), Roissy (1916) et Ecouen (1941). Puis en bleu ciel, nous trouvons des collectivités locales au niveau assez proche des scores départemental et national, quoiqu’un peu plus élevé. Dans cet ensemble, il convient de distinguer les très petites communes, qui s’échelonnent de 300 à 700 habitants : Chennevières-les-Louvres (1723€), Bouqueval (1718 €) et Bonneuil (qui fait figure d’exception au sein de Val de France, tant par sa taille que son niveau de revenu : 712 habitants, 1721 € mensuels) ; et les localités plus importantes qui vont de 4000 à 9500 habitants comme Fosses (1769€), Survilliers (1770), Le Thillay (1693) et Louvres (1680).

Enfin, on observe un ensemble plus défavorisé, en dessous de la moyenne val d’oisienne (qui est -rappelons-le- de 1696 €) : Arnouville (1522 €) Gonesse (1265 €) et Goussainville (qui fait figure d’exception « pauvre » dans la CA aisée Roissy-Porte de France, avec 1227 € mensuels).

Sur l’ensemble du territoire du SIEVO, on observe des différences entre localités qui vont de 1 à 3 en ce qui concerne les revenus médians. Mais ces écarts sont beaucoup plus élevés au sein d’une même commune, entre les 10% des ménages les plus aisés et les 10% les plus pauvres, puisqu’ils varient de 3 (Marly-la-Ville) à 6 (cf Arnouville, Gonesse)… voire même dépassent 7 : Sarcelles, Villiers-le-Bel, avec un record pour Garges-lès-Gonesse avec près de 8 (7,9). Ainsi, ce sont à la fois les communes les plus pauvres qui sont aussi les plus inégalitaires. Et les 10% les plus riches de la commune la plus aisée (St Witz) ont des revenus…  19 fois supérieurs aux 10% les plus pauvres de la commune au niveau le plus bas (Garges) !

Les 130 000 emplois prévus sur le Grand Roissy d’ici 2030 ne vont pas arranger les choses, mais aggraver les écarts :

1 / le cœur de pôle de Roissy se taille la part du lion, alors qu’il cumule déjà massivement les emplois (47 fois plus d’emplois que d’actifs dans le village de Roissy) ;

2/ certaines communes sinistrées comme Aulnay-sous-bois dans le 93 (fermeture de PSA) ne sont pas concernées par ces grands projets ;

3/ des communes très pauvres n’ont pas de grands projets (Garges-lès-Gonesse, Villiers le Bel) ou qui engendrent très peu de créations d’emplois (le Dôme à Sarcelles).

En Conclusion, ce ne sont pas les richesses qui manquent sur le territoire du SIEVO, c’est leur répartition. L’émiettement de la gouvernance territoriale, avec des CDT de petite taille situés de part et d’autre de la frontière départementale entre le Val d’Oise et la Seine-St-Denis contribue à la concurrence entre territoires, à l’accaparement des richesses sur certaines communes et à l’opacité des décisions.

Il y a un fort contraste entre le cœur de pôle de Roissy qui cumule les emplois et les retombées financières et une périphérie urbaine dense au Sud, à l’environnement sacrifié qui subit avant tout les nuisances, sans pouvoir bénéficier des emplois de l’aéroport, compte tenu du décalage qui ne cesse de croître entre les niveaux de qualification de la main d’œuvre locale et les postes offerts. Et cette zone agglomérée contraste elle-même avec la zone rurale du Nord de la plaine de France, avec des petites communes qui ont su préserver un environnement de qualité et accueillent des populations aisées. Ceci est vrai pour quelques localités val d’oisiennes, mais surtout pour celles qui sont situées de l’autre côté de la frontière francilienne, dans l’Oise au Sud de la forêt de Chantilly, ou au Nord de la Seine-et-Marne, dans la vallée de la Goëlle notamment.

Jacqueline LORTHIOIS

15/08/2014

EXPLICATION DU TABLEAU JOINT

 Quelques définitions

Revenu Médian : il est établi ici par mois, en euros, par unité de consommation, hors impôts et prestations sociales. La médiane est la valeur qui sépare une population donnée en deux moitiés égales (au dessus et en dessous) : on estime que ce mode de calcul traduit mieux les situations de pauvreté/ richesse que la « moyenne » dans les évaluations.

Unité de consommation : 1 pour le premier adulte du foyer, 0,5 pour les autres membres de 14 ans et plus ; 0,3 pour chaque enfant de moins de 14 ans.

Déciles : Distribution des revenus classés en 10 parties égales. La limite du « premier décile » est la valeur en dessous de laquelle se situent les 10% les plus pauvres ; la « limite du 9ème décile » est la valeur en dessous de laquelle se situent 90% des revenus et au-dessus de laquelle se situent les 10% les plus riches.

Rapport interdécile : écart entre les 10% les plus riches et les 10% les plus pauvres, mesuré par le sommet du 9ème décile rapporté au sommet du premier décile (après écrêtement des très riches et des très pauvres).

Source : Observatoire des inégalités, publications du Compas

Données : INSEE 2010

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