Auchan localise ses activités d’assurance à Malte et économise ainsi 22 millions d’euros d’impôts entre 2014 et 2016
Cette information ne découle pas d’« une fuite » de documents dont aurait bénéficié un journaliste de Médiapart. Elle est simplement le fruit du travail d’un réseau de 19 journalistes d’investigation appartenant à 13 journaux européens, qui se sont regroupés au sein de l’European Investigative Collaborations (EIC).
À l’image des “Panama papers”, les “Malta files” rassemblent 150.000 documents censés être confidentiels, donnant à voir de multiples montages réalisés dans le paradis fiscal qu’est l’île de Malte.
1.300 Français, patrons, célébrités ou même artisans, auraient ainsi “facilement” organisé leur évasion fiscale. Et trois groupes hexagonaux, spécifiquement, sont pointés du doigt par Mediapart : Renault, PSA et Auchan.
Auchan aurait économisé 22 millions d’euros d’impôts en 3 ans en localisant ses activités d’assurance à Malte via sa filiale bancaire Oney qui rapatrie certaines primes d’assurances de ses clients dans une filiale à Malte, pays beaucoup plus conciliant en matière de fisc. Autant de recettes fiscales en moins pour la France.
Prêtant de l’argent à ses clients Auchan leur demande de souscrire une assurance. C’est à Malte que les cotisations sont encaissées dans sa filiale Oney. Ainsi en 2016 Oney a réalisé 23,7 millions d’euros de profits, a payé 8,3 millions au fisc maltais et s’en est fait rembourser 7. Soit un taux d’impôt sur les sociétés de 5,5 %, six fois moins élevé qu’en France. La filiale d’Oney basée à Malte, Oney Holdings Limited, rassemble 16 collaborateurs et exerce une activité d’assurance et de réassurance en collaboration avec six pays, en zone euro et hors zone euro.
Rien d’illégal à cela comme s’en défend Oney qui indique dans un communiqué que « ces opérations sont effectuées dans le strict respect des conventions internationales signées entre les pays avec lesquels notre filiale opère, et l’État de Malte. Les autorités de tutelle françaises et l’administration fiscale française sont pleinement informées de l’existence de cette entité et de son activité internationale ». De l’optimisation fiscale somme toute classique, mais qui est autant d’argent qui ne rentre pas dans les caisses de l’État français.
Et pourtant ce même État français ne semble pas s’émouvoir particulièrement de pareille évasion fiscale. En effet comme le note la Sénatrice de Paris, Marie-Noëlle LIENEMANN, dans une question écrite au gouvernement, déjà en 2013 un rapport d’une mission d’information de l’Assemblée nationale sur l’optimisation fiscale des entreprises dans un contexte international sonnait l’alarme sur l’usage des captives d’assurances comme outil d’optimisation fiscale à grande échelle : « Il est ainsi particulièrement aisé de localiser une captive dans un État fiscalement accueillant. […] L’activité de la captive étant par nature immatérielle (il s’agit de simples flux intragroupe), la société dédiée à l’assurance peut être implantée n’importe où sur le globe. » (extrait du rapport enregistré le 10 juillet 2013 ; Pierre-Alain Muet, rapporteur).
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