Commerces
Publié le mardi 20 septembre 2016 par Emilie Zapalski
Malgré les nombreuses critiques émises au cours du débat public qui s’est tenu de mars à juillet 2016, Alliages et Territoires, le maître d’ouvrage du très gros projet EuropaCity ne baisse pas les bras. Il doit présenter une nouvelle copie en décembre 2016 tenant compte des conclusions des débats. La région demande que 30% des emplois annoncés bénéficient à la population locale.
“Nous allons poursuivre la mise en œuvre de ce projet et le faire évoluer dans son offre et sa conception architecturale, en y associant l’ensemble des parties prenantes.” Christophe Dalstein, le directeur d’Alliages et Territoires, le maître d’ouvrage d’EuropaCity, un méga-complexe commercial et de loisirs prévu au nord de Paris, n’a pas attendu les trois mois qui lui étaient accordés pour officialiser sa position. Il a ainsi confirmé son intention de poursuivre le projet le 12 septembre, soit le jour de la publication du rapport de la Commission nationale du débat public (CNDP). Un document qui dresse le bilan du débat public qui s’est tenu du 15 mars au 13 juillet 2016.
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“Deux visions de la société aux antipodes l’une de l’autre”
… “Le dialogue entre opposants et partisans a parfois été difficile et leurs positions ne semblent pas avoir évolué”, constate ainsi Christian Leyrit, président de la CNDP, dans son rapport. Au cœur des critiques : une élaboration du projet “en dehors d’un contexte territorial” et qui “n’a pas établi de réelles ramifications sociales, fonctionnelles et urbaines avec son environnement”, détaille Claude Brévan, présidente de la commission particulière en charge de l’organisation et de l’animation du débat sur EuropaCity, qui a également rendu un compte-rendu détaillé du débat public le 12 septembre. Les échanges ont mis en avant “deux visions de la société aux antipodes l’une de l’autre”, observe cette dernière, avec “d’un côté une société qui s’affranchirait de la course à la consommation pour aller vers davantage de sobriété et s’engagerait vers une transition écologique et énergétique ; de l’autre, une société attachée aux modes de vie urbains ou aspirant à y avoir accès, mais taraudée par le chômage, et pour laquelle seul un modèle plus classique de croissance et de développement économique permet d’apporter des solutions durables”. Deux visions “d’autant moins conciliables que les très importants montants financiers en jeu, apportés par une entreprise privée aux filiales multiples, associée à une entreprise chinoise, fournissaient l’occasion d’ouvrir des polémiques”. Alliages et Territoires, filiale d’Immochan, la branche immobilière du groupe Auchan, s’est associée à un partenaire chinois, Dalian Wanda, spécialisé dans l’immobilier et le divertissement, pour monter le projet.
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Polémique sur le nombre d’emplois
Le bilan de la CNDP fait aussi apparaître la crainte de la part des professionnels du secteur du commerce de “dégâts importants sur les commerces existants, notamment les magasins de proximité qui souffrent déjà de la concurrence des grandes surfaces implantées sur le territoire”.
L’emploi local et la formation des jeunes du territoire tels que prévus dans le projet font également polémique. Des experts publics et privés remettent en question le nombre d’emplois annoncés (11.800) considérant qu’il est surestimé et que le projet pourrait aussi conduire à des destructions d’emplois. “Vous le savez, si jamais il y a 11.800 emplois, ils viendront d’Aéroville, de Paris Nord 2 et d’O’Parinor, ainsi que des autres centres commerciaux qui fermeront. En fait, s’il y a création, ce sera un déplacement d’emplois”, a ainsi répliqué un conseiller municipal de Seine-Saint-Denis durant le débat.
La région Ile-de-France demande par ailleurs que la population locale soit représentée à hauteur de 30% minimum dans ces emplois, et veut un accès privilégié des TPE et PME à la commande.
La question de l’artificialisation des sols a également été largement abordée durant le débat public, même si le Schéma directeur de la région Ile-de-France (Sdrif) a ouvert à l’urbanisation 300 hectares du sud du triangle de Gonesse, dont les 80 hectares du projet envisagés sur d’excellentes terres agricoles. “Pour les opposants et la profession agricole, le premier objectif devrait être une limitation drastique de la consommation des terres agricoles (parmi les meilleures d’Europe)”, relate le rapport de la CNDP. Plusieurs participants ont proposé d’utiliser la friche industrielle du site de PSA d’Aulnay-sous-Bois fermé en 2013.
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Les opposants au projet sont très mobilisés. Le Collectif pour le triangle de Gonesse prévoit ainsi de “renforcer sa mobilisation” pour que le complexe ne voie pas le jour.
Le groupe doit présenter une nouvelle version de son projet en décembre.
En lire plus : http://www.localtis.info/cs/ContentServer?pagename=Localtis/LOCActu/ArticleActualite&cid=1250271330417
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En rappelant que “la région demande que 30% des emplois annoncés bénéficient à la population locale”, Mme ZAPALSKI paraît transposer aux emplois créés en phase d’exploitation ce que la Région se contente de demander pour les emplois créés en phase de chantier !
Dans son rapport la présidente de la CPDP, Mme Brévan, a déjà expliqué que cet objectif assigné par la Région aux seuls emplois créés en phase de chantier était peu crédible.
Voir pp. 74-75 du rapport disponible à l’adresse : https://europacity.debatpublic.fr/
“Les emplois en phase chantier
Les participants au débat ont disposé de quatre approches différentes concernant le nombre d’emplois susceptibles d’être mobilisés pendant la construction d’EuropaCity : celle du maître d’ouvrage issue de l’étude réalisée par le bureau d’études Sémaphores, celle du CPTG réalisée par Mme Lorthiois, celle de l’EPT Paris terres d’Envol, réalisée avec l’appui technique et l’expertise indépendante du cabinet McKinsey et enfin le dire d’expert réalisé par M. Degorre, mandaté par la commission.
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Bien que les écarts entre les estimations d’emploi provenant de différents experts qui vont de 2 500 à 4 200 soient conséquents, ce n’est pas cet aspect qui a été le plus débattu. L’essentiel des débats a porté sur la capacité qu’aurait le projet à mobiliser ce potentiel au profit des résidents du territoire et en particulier des demandeurs d’emploi. L’investisseur n’étant pas soumis au code des marchés publics, il ne serait tenu à aucune obligation à caractère social. À l’inverse, il n’aurait aucune contrainte quant au choix des entreprises qu’il souhaiterait retenir. Il a pris des engagements: « Allouer un minimum de 5% du volume d’heures générées par le projet en phase de construction aux personnes éloignées de l’emploi et relayer cet objectif à chacun de ses partenaires »99. Au cours du débat, il n’a pas écarté la possibilité d’aller au-delà de 5% «Nous avons entendu les volontés d’évolution potentielle de ce chiffre, l’EPA Plaine de France, notamment dans l’opération d’aménagement de la ZAC, affirme un objectif de 7% des emplois. En tant qu’opérateur privé, nous ne sommes pas soumis à ces obligations, mais il nous apparaît assez cohérent de pouvoir avancer de concert avec la puissance publique dans les engagements qui sont pris dans le cadre de l’aménagement du Triangle de Gonesse »100.
Par ailleurs, comme l’ont souligné de nombreux participants parmi les collectivités locales et les milieux économiques, le recours à des emplois locaux pour la phase chantier est très directement lié à la capacité des entreprises locales à accéder aux marchés de travaux et à la stratégie de recrutement du « major » du BTP qui réaliserait la majeure partie du complexe. Certains ont fait valoir que ces grandes entreprises recruteraient localement surtout des emplois d’exécution, (qui représenteraient 20% du total), les grandes entreprises disposant de personnel permanent et notamment de cadres et d’employés qualifiés qui se déplacent en fonction des chantiers. Dans son cahier d’acteur, la Région Îlede-France a fait part d’attentes : « En phase chantier, la région attend du maître d’ouvrage une représentation de la population locale dans les emplois créés à hauteur de 30% minimum. A cet effet, la région plaidera pour que les TPE/PME aient un accès privilégié à la commande ». Outre qu’il est difficile d’estimer le nombre d’emplois réellement nouveaux qui seraient créés pour la construction d’EuropaCity en l’absence d’une connaissance fine du potentiel actuel des entreprises du secteur, qui selon un intervenant est très important, et de leurs perspectives d’activité à cinq ans, la commission a relevé que lors de l’exposé sur la situation de l’emploi, Pôle Emploi avait souligné que la part de demandeurs d’emploi dans le domaine du BTP était très minoritaire dans l’ensemble du territoire concerné par le projet, la majorité des chômeurs aspirant à trouver du travail dans le domaine des services. Par ailleurs, il ne semble pas que les dispositifs de formation envisagés par le maître d’ouvrage concernent les métiers du bâtiment et des travaux publics, mais qu’ils soient destinés à la qualification aux métiers qui s’exerceraient au sein d’EuropaCity.
La question récurrente des travailleurs détachés a été également évoquée comme créant une concurrence avec des recrutements locaux.”